Traditionnellement, la valeur économique est attribuée à des biens et services tangibles, mesurables par leur rareté, leur coût de production ou leur utilité directe. Cependant, cette approche néglige une gamme étendue de facteurs intangibles qui sont cruciaux pour le bien-être humain et la santé de notre planète. NEMO IMS propose de redéfinir la valeur pour englober ces éléments intangibles, tels que les services écosystémiques, la biodiversité, la stabilité climatique, le capital social et culturel, ainsi que le bien-être psychologique des individus. À l'ère où les défis écologiques, sociaux et économiques se font de plus en plus pressants, il devient impératif de repenser nos critères de la valeur, en reconnaissant et en sanctuarisant ce qui ne peut être ni touché ni quantifié au sens traditionnel.
Le dilemme est que la détermination de cette valeur ne serait possible que par une reconnaissance collective. Je ne parle ici d'un consensus mondial pour la reconnaissance des communs et valoriser des activités économiques indispensables qui ont pour but de les préserver et de les régénérer. L'idée est d'accorder une valeur écosystémique en opposition aux valeurs habituellement reconnues par les mécanismes du marché. Une chose qui est essentielle à tous mais pour laquelle personne ne veut payer : la préservation des communs et des conditions de la vie. Ce défaut de reconnaissance immédiat des services écosystémique est ce que nous appelons la tragédie des horizons. Les impératifs lointains de la préservation des communs se heurtent aux critères de la finance business as usual à court-terme.
Nous proposons ici une vision audacieuse et nécessaire pour un avenir durable. Cette proposition appelle à une réévaluation fondamentale de ce que nous valorisons et de la manière dont nous mesurons le succès, en plaçant la soutenabilité, l'équité et la régénérescence au cœur de l'économie mondiale.
Dans le contexte économique mondial actuel, le concept de NEMO IMS propose une révolution éthique dans notre compréhension et notre approche de la valeur. Ce système novateur de prise en compte des communs défie les normes traditionnelles de la finance et remet en question le postulat de croissance infinie de l'économie extractive.
Dans l'épisode précédent, nous avons vu que les hommes ne confèrent de la valeur qu'à des biens et services pouvant faire l'objet d'un échange. L'or comme marchandise ultime, en est l'exemple le plus frappant. De par leurs ambitions et leurs empressements, Ils négligent ce qui constitue le support biologique et écosystémique de la ressource convoitée.
Depuis la nuit des temps, les hommes n'envisagent l'économie que comme un grand marché. Dans cette logique, ils ne voient la valeur que dans des choses auxquelles ils attachent une importance personnelle ou sociale. Mais c'est oublier que l'économie des choses que l'on compte toujours n'est possible que grâce à l'existence de choses que l'on ne compte jamais.
Dans l'ambition de posséder toutes les perles, nous saccageons toutes les huitres, et le jours où il n'y a plus d’huitres, il n'y a plus de perles.
Cette logique est la même pour les dodos de l'ile Maurice, la pêche électrique, la décimation des abeilles par les intrants chimiques, la barrière de Corail et la fonte des glaciers. Le business as usual obéit à des impératifs de rendement à court terme et à ce titre, la précaution à long terme est toujours négligée. Notre manière de faire l'économie, ne prend jamais en compte les choses vitales mais sous-jacente. Dramatiquement, tout ce qui ne se comte pas ne compte pas. Jean-Baptiste Say (1806), disait que les ressources naturelles étaient inépuisables et que leur prélèvement dans le but de permettre aux hommes de produire toujours plus de marchandises ne posait pas de problèmes. Mais ça, c'était il y a 220 ans. C'est-à-dire avant la révolution industrielle. Une époque où l'on avait pas délimité les confins de l'Amérique, où la population mondiale était estimée 900 millions d'humains, une époque où la pollution n'était pas tant présente, Sadi Carnot n'avait pas encore lancé les bases de la thermodynamique, et le rapport Meadows (1972) n'avait pas été écrit. Entre temps, les choses ont évoluées et le contexte est différent. Autrement dit, appréhender l'économie d'aujourd'hui avec des certitudes du passé n'a aucun sens. L'économie future devra tenir compte de choses que nous négligeons depuis que nous inventé le commerce et la comptabilité.
Sous NEMO IMS, les activités économiques sont encouragées à aligner leurs succès non seulement sur des profits commerciaux, mais aussi sur leur capacité à régénérer et à préserver les ressources naturelles. Si cette seconde condition n'est pas remplie, les bénéfices fondent.
Les nations, les entreprises et les hommes obtiendront leurs liquidités dans le cadre d'activités régénératives et seront invitées à les utiliser dans des échanges de biens et services à faibles préjudices.
La détermination de la valeur doit incorporer le concept de précaution et contribution à la santé à long terme de la planète et au bien-être de ses habitants. Si la production d'un bien ou un service engendre trop de nuisances par externalités négatives, son revenu doit être amputé, jusqu'au point où les financiers définissent ces productions comme insolvables et renoncent à les financer. Nous reverrons ces points lors du chapitre sur les recommandations macro prudentielles de NEMO IMS.
Une économie sobre est incompatible avec une finance ogre. NEMO IMS envisage un système bancaire, monétaire et financier qui permet la décroissance sans renoncer aux critères sociaux essentiels. Notre système financier actuel est un accélérateur de croissance, nos impératifs écologiques et sociaux nécessitent la création d'un frein financier. Ce frein devra savoir faire la part des choses entre l'essentiel et le superflu. Nous savons que le PIB, indicateur principal de la santé de nos économies, est absurde parce qu'incomplet. Généralement, les économistes ne s'émerveillent que de la grandeurs des chiffres sans jamais tenir de discours critiques sur la teneur des choses qui en sont à l'origine.
On imagine mal la quantité de choses absurdes, inutiles et polluantes que les hommes se contraignent à produire au nom de la réussite économique et la gloire du PIB.
La décroissance, dans ce contexte, doit être pensée pour garantir le progrès social, la qualité de vie, le BNB mais sans recours à la croissance. Elle doit promouvoir une économie qui respecte les limites de la planète tout en assurant la justice sociale. Dans ce but, notre logiciel monétaire, bancaire et financier doit être repensé depuis la base.
Il conviendra donc de faire la part des choses entre l'essentiel et le superflu, de réduire les financements marchands nuisibles, une réduction de la consommation matérielle excessive et de la dépendance aux énergies fossiles. Il s'agira par ailleurs d'augmenter les financements de l'essentiel non-marchand sans passer par la fiscalité. La stratégie est d'inciter des transferts sociaux depuis les bullshit jobs vers les activités de sens.
Le système NEMO IMS propose un modèle financier qui distingue le marchand du non-marchand. Par principe, il est illusoire, injuste et vain de tenter de financer ces deux sphères par les mêmes institutions lorsque l'on a saisi le dilemme des horizons. Il convient certes de conserver la finance de marché, mais de la restreindre à des activités essentielles et de les orienter vers des processus générant le moins possible de préjudices. Les activités jugées superflues en plus d'être nuisibles seront progressivement délaissées faute d'être substituées par des solutions de moindres impacts.
Comme le yin et le yang, la finance de marché, productiviste et extractive, se complètera par une finance de régénérescence et préservations des communs.
NEMO IMS transforme la finance d'un outil de croissance sans limites en un outil de soutien aux projets essentiels pour la survie et le développement durable de l'humanité. Dans le cadre de NEMO IMS, les critères de succès économiques évoluent. Ils ne se concentrent plus uniquement sur le PIB, mais intègrent des mesures de santé environnementale, d'équité sociale et de qualité de vie.
Ce n'est pas le travail qui manque, c'est l'emploi ! Cette formule peut sembler étrange mais par culture, nous commettons souvent une confusion sémantique entre les notions de travail et d'emploi. D'un point de vue économique, un travail (en puissance) ne se transformera en emploi (en acte) que si de la rentabilité potentielle est détectée. Si un entrepreneur voit en une chose un marché potentiel, il démontrera aux financiers tout le bien fondé d'une création d'entreprise. Il embauchera des employés et ce travail à faire se transformera en travail qui se fait et qui rémunère (emploi).
Tous les domaines de l'économie ne répondent pas nécessairement à ces critères. Pourquoi la dépollution d'une plage doit se faire par des bénévoles alors que les responsables de ces pollutions se sont bien souvent enrichis en produisant des choses polluantes ? Quelle injustice ! Je peux vous dire, pour le faire de temps en temps, que ramasser des déchets sur une plage provoque bel et bien une dépense d'énergie et fait transpirer nos fronts.
Mais toute les sueurs qui coulent de nos fronts ne semblent pas disposer de la même valeur au regards des économistes et financiers. Pourquoi ce qui répare doit être laissé à la charge de bénévoles, alors que l'enrichissement semble être le privilège de ceux qui polluent ?
Les hommes ne polluent pas pour le plaisir de polluer. Ils polluent tout simplement parce que c'est la manière la moins couteuse de produire.
Les exemples comme ceux-ci sont légions, et nous en avons déjà cité quelque-uns. D'une manière générale, l'extraction génère des revenus et engendre des externalités négatives. La réparation des ces externalités sont perçues comme des charges dont on fait souvent l'impasse au nom de la satisfaction financière.
Au regard de notre système financier, le court terme est toujours privilégié au détriment du long terme. Il semblerait que nous ne parviendrons pas à motiver la finance dans la réalisation de ces domaines sans une transformation radicale de nos manières d'envisager l'économie et la monnaie. La préservation des communs nécessitera une inversion de valeur dans nos us et coutumes. Une indispensable évolution économique qui désigne ce que la comptabilité marchande ne sait pas compter.
Si le business as usual ne tiens pas compte de la préservation de la nature, nous devons inventer une économie d'équilibre entre une extraction mesurée et une réparation indispensable. Lorsqu'on y pense bien, la nature fonctionne déjà selon ce genre d'équilibre depuis la première étincelle de vie. Mais, en tant qu'êtres se croyants sortis de la cuisse de dieu, nos ancêtres n'auraient pu l'accepter. L'évolution darwinienne n'a été possible que grâce à un équilibre spontané entre proies et prédateurs. Puis l'homme, super-prédateur se croyant supérieur à la condition animale, a cru intelligent d'exploiter les ressources sans limites et sans comprendre que sa propre vie dépendait de la perpétuation de cet équilibre. De la même façon que habitants de l’ile de Pâques ont saccagé leurs écosystèmes pour ériger des idoles, l'humanité fait de même avec la planète entière ; nous saccageons tous nos écosystèmes pour ériger des babioles.
Pour réussir cette transformation, une éducation et une sensibilisation approfondies sont nécessaires. Les individus et les institutions doivent comprendre l'importance de cette nouvelle éthique de la valeur et être encouragés à adopter des pratiques durables dans leur vie personnelle et professionnelle. Ceci dans l’idée, que la transition ne se fera pas si les pays conservent des postures nationalistes et de compétition économique. Gardons à l'esprit que cette compétition est alimentée par une exploitation outrancière des ressources naturelles.
L’idée ici est de faire comprendre à tous les pays qu’ils se trouvent sur la même planète. Et même si un problème écologique se situe à l’autre bout du monde, il doit être considéré comme le problème de tous. Même s’il ne nous touche pas directement, par effet domino, nous finirons par en connaitre les conséquences.
Cette philosophie est finalement très simple : Un problème écologique dans un autre pays, c’est un problème écologique sur notre « vaisseau spatial » et ce problème doit être envisagé de manière universelle et pas de manière nationaliste. C'est ce qui nous fait défaut depuis toujours.
Nous devrons abandonner nos archaïsmes belliqueux, nos postures guerrières et égoïstes. Elles ne nous seront d'aucun recours. Soit nous réussissons ensemble ou nous échouons tous.
Le projet de garantir les conditions de la vie sur Terre est le problème de tous et chacun doit en prendre conscience, parce que chacun a une rôle à jouer dans cette mission. Nous avons vus que dans une compétition internationale sans garde fous, revient à une apologie de la nuisance au nom de la réussite économique. Même si des pays sont animés de bonne volonté, le monde est soumis à la volonté des plus nuisibles. C'est donc de manière mondiale que nous devons organiser une sanctuarisation des communs et la préservation des services écosystémiques.
Le marché est parfait pour déterminer le prix d'une tonne de harengs ou de cabillauds, car ce sont les mécanismes de l'offre et de la demande qui agissent pour la détermination du prix. C'est donc le désir des demandeurs qui permet à l'offre de se créer.
En revanche, le marché ne sait pas déterminer le prix d'une tonne de déchets plastique repêchée en mer. Ce n'est pas tant que nous n'aurions pas besoin de dépolluer la planète, mais cette tâche revêt d'un caractère collectif. Homo œconomicus accepte de consacrer quelque argent pour acheter du poisson, mais rechignera à dépenser pour une cause qui concerne la collectivité. La main invisible ne semble pas être concernée par la nécessité collective.
Dans le constat que les radars de l'offre et de la demande sont aveugles et inopérants pour déterminer la valeur d'activités extra financières, c'est la démocratie qui doit prendre le relais. Nous en verrons plus sur ce propos lors du chapitre sur le GAIA Economic Symposium
Déterminer mondialement des labels de biens communs, y adosser des niveaux de revenus selon la prestation par appels d'offres. Ces revenus libellés NEMO Green DTS seront reconnus par les banques centrales et convertis dans les devises nationales comme rémunération pour les prestataires des communs.
Comme si la réparation de la planète constituait une nouvelle manière de faire commerce international
Cette solution consiste en une redistribution des cartes en permanence. Cela permet à des hommes, des entreprises ou des nations de réussir économiquement autrement que par des processus extractifs.
Ces changements incitent les entreprises et les gouvernements à repenser leurs stratégies et leurs politiques pour favoriser une économie qualitative plutôt que quantitative.
NEMO IMS apporte un imaginaire alternatif, une manière apaisée et inédite de concevoir l'économie mondiale. En créant des marchés intentionnels internationaux pour la régénérescence des communs, il atténue l’extraction, remplace la prédation par la prudence, la compétition par la coopération, la performance par la pertinence.
Préserver les conditions de la vie sur Terre ne relèvera que de cette simple opération dans nos mentalités : reconnaitre la valeur de l'inestimable, de l'intangible, plutôt qu'à ces choses qui brillent et exacerbent nos vanités.